Pierre de Rosette (1)
Je n'aurais peut-être jamais été appelé. Cette chaise aurait toujours
été là. Ni pour un autre. Ni pour moi. Ni pour personne. À la recherche d'un
corps. D'une déesse absente.
Une nuit, tu m'aurais prêté ton visage – tu aurais
volé la clé d'un paradis. Sur tes plaines tu t'en es revenu, vent mauvais.
Tu es venu ici pour vieillir jeune. Attention. Ta
mort ne t'a pas encore trouvé. Le jour où elle le fera ne sera pas un jour.
Elle t'arrivera dans le dos. Et remuera. Dans ta blessure. Tous tes couchers de
soleil.
Ta mort dans la nuit, c'est l'émergence de mon
jour. Dans l'éclair blanc du pain que je déchirerai avec mes dents je te
trouverai, petit cœur. Avec toi, je vouvoierai le silence. Il ne sera plus de
crainte valable avec toi.
Parler d'amour fait penser au roseau : tu
t'inclines et te relèves.
Ta mort dans la nuit, c'est la mort de la mort.
C'est tout un village qui se serre sur la longueur
d'un pouce.
Je n'aurais peut-être jamais été appelé. Cette
chaise aurait été une simple chaise. La chaise de quelqu'un d'autre. Celle qui
n'est pas à moi. Ni à personne maintenant. À la recherche d'un corps. D'une
déesse absente.
Nicolas Jaen réside à Toulon, où il est né en 1981. Livres publiés
(entre autres) : La nuit
refermée (L'arachnoïde), Les
éblouis, roman (MLD), À port
de temps (collectif), Ce
chant éloigné, Coquelicot,
autoportrait froissé et Livre noir (tous 3 à l'Atelier des Grames).
Présent dans les n° 10, 22, 23,
24, 26, 27 et 28 de Lichen.
Troublant. (Cette chaise me rappelle celles de Van Gogh)
RépondreSupprimer