Culottes des anges
Nippes sous une vitre dans un cadre posées sur une feutrine
vert olive exposées parfaitement repassées comme neuves en haut à gauche une
culotte de jeune fille blanche benedictus un maillot de corps avec broderies
blanc épinglés l’un sur l’autre un chapelet aux grains marrons et croix verte
un chapelet aux grains marrons et croix bleue un chapelet aux grains dorés et
petite croix en or une croix seule près de la culotte hosanna (jambe gauche) en
haut à droite après les crucifix un caleçon de garçon blanc avec une étiquette
bleue en son milieu un maillot de corps blanc amen au milieu du cadre deux
cordons tressés refermés en forme de boucle l’un gris l’autre beige tout à
gauche deux embrasses à pompons l’une grise l’autre beige nunc dimittis une
petite croix seule au milieu du tableau un peu sur la gauche une courte tresse
alléluia de huit boucles puis encore un peu plus à droite deux épaulettes kyrie
l’une beige l’autre bleue encore un peu plus bas à gauche puis à droite des
cordons tressés deux petits et fins le troisième plus large et long fermé en
boucle agnus dei encore trois crucifix en bois avec ou sans le christ puis en
bas du tableau sous la vitre deux paires de socquettes blanches dans leur
emballage encore neuves une culotte de petite fille blanche immaculée plus
petite que la première dominus vobiscum un débardeur blanc associé à la culotte
punaisés l’une sur l’autre trinité plus à droite encore deux paires de
chaussettes sanctus d’une taille plus grande que les précédentes l’une tournée
vers le haut avec des motifs comme une broderie l’autre très simple le pied
tourné vers le bas gloria.
Texte
extrait de la série Inventaires (avril 2018)
Philippe Labaune vit et travaille à Lyon. Metteur en scène, il
a fréquenté nombre de poètes : Rilke, Pessoa, Collobert, Zürn, Gleize,
Prigent, Dubost, mais aussi les textes de la jeune génération de
dramaturges : Roche, Mougel, Gallet. Il défend un « théâtre de
poésie » qui ferait la part belle à la perception sensible et
inconsciente, à la musique de la langue. L’écriture émerge aujourd’hui comme
une rivière souterraine qui atteindrait le jour après tant d’années de travail
invisible. Présent dans le n° 28 de Lichen.
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