Photo - Dragos Toader
Nous avons parfois honte de notre dignité
que parfois les veilleurs
de Méga Image.
les veilleurs de la même ethnie
pensent que la dignité
serait un torchon pour la vaisselle.
et comme ils lâchent leurs yeux. quelques chiots
pour nous suivre des haillons. nous allons
dans une allée
ils sont déjà devant nous. nous sommes les moins bien habillés.
le costume de gens intelligents en train de sécher. pour ne
surtout pas sous
l’âme que nous cachions quelques canettes de bière
ou peut-être une baguette de pain. ils pensent que nous
sommes des collectionneurs d’orge liquide
et de restes de
porc ou volaille dans des sacs en nylon
dont on recouvre les meubles à l’extérieur
quand il pleut
et comme ils se penchent
vers cette cavité thoracique rouge les caissiers. ils
exigent de voir nos vestes déboutonnées nous enlèvent tout
des poches placées sur la poitrine avec un sentiment de
culpabilité bien que
notre sang soit d’un rouge pur.
nous ferions mieux de demander
au pain d’être moins cher
de demander aux canettes de bière d’être moins chères
de demander au saucisson d’être moins cher
mega image a des veilleurs avec la même couleur
de sang. veilleurs pour le veilleur
seuls les T-shirts jaunes nous séparent du même esclavage
quand on nous mettait des cornes
et des muselières pour ne pas manger les raisins de la vigne
nous nous demandons parfois si la dignité de l’appartenance
ethnique
se termine chez mega image ou les veilleurs roms
qui se font passer pour des veilleurs gadjé.
Mon énergie se consume
entre une récréation et une autre récréation.
dès que j’entends sonner je me laisse
porter par le vacarme je me cogne contre les murs.
une langue électrique de cloche
qui annonce les pauses entre les échos.
savoir ce qu’il ne faut point savoir.
je m’étire dans un sens et dans l’autre
à l’intérieur de la cloche au moins
un arc de cercle.
mais toujours un trait sur les murs.
de la vie peinte du mur. je m’amenuise
personne pour me saluer avec bonne nuit
tous me disent bonjour. dans le hall
du troisième étage pleins de vie
probablement les élèves. ils ont vu un peu de lumière
brillant toujours. et moi aussi.
je collecte les lucioles dans un sachet contre les rhumatismes
pour de la peinture phosphorescente.
autrefois une ampoule brillante comme le soleil se balançant.
les sieurs parents regardent à travers moi
une fois j’ai salué un mur d’entre les murs.
Emil-Iulian Sude est né le 6 septembre 1974, à Bucarest où il travaille de nuit, en tant qu’agent de sécurité. L'un des premiers poètes roms primés de Roumanie, il y a publié cinq recueils de poèmes et a remporté plus de vingt prix et distinctions, dont le Diplôme d'excellence 2018 pour sa contribution au développement et à la promotion de la culture et de l'identité roms. Paznic de noapte [Veilleur de nuit] (Casa Cărţilor, 2023) a reçu le prix Ion Zubașcu au Festival international de poésie de Sighet (Roumanie) 2023 et sera publié en anglais, dans la traduction de Diana Manole, chez Laertes Press (États-Unis) en 2025. C’est sa première apparition dans Lichen.
Puissant et essentiel . Magnifique découverte .
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