Pascale Barraud


Évidée écopée tout le temps tout le temps il y aura des jours où les gens ne sauront pas que moi je suis et qu’ils n’y pourront rien jamais quoi qu’ils pensent que je sois ils n’y pourront rien jamais à ce que moi je suis et à ce que je sais que je suis 
non rien
Malgré les couches et les couches de croyances entassées dans ma généalogie comment peuvent-ils croire qu’ils savent quelque chose de moi comment alors qu’eux-mêmes ne savent pas d’où ils viennent se bornent à la petite étroite rassurante limite de leur corps doigts de pieds au sommet de leur crâne sans imaginer rien du monde qui s’agite en eux et déborde de leurs regards 
Moi je suis parce que je sais que je ne suis pas tombée là comme un cheveu sur la soupe que je suis le relais d’une lignée de malheureux bougres et que tous respirent par ma bouche
Je suis, c’est je suis eux plus moi
Et ça fait beaucoup
Et ça fait beaucoup

Et ça fait trop

°

Aux paupières
De la mer
Tremblent
Les larmes de sel
Guirlandes ouvragées
Par les facéties du ciel
Rêveur




Bourguignonne — profondes racines terriennes parfois rassurantes parfois encombrantes —, théâtreuse, poétesse et romancière, Pascale Barraud est engagée jusqu'au cou pour la cause humaine et fait sienne cette déclaration de Calaferte : « Le devoir de l'art c'est de fracasser les consciences ». Présente dans le n° 47 de Lichen.

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