Nadine Travacca


La course 

Quand il court il a des phrases toutes faites qui tournent dans la tête comme une petite bête 
Des phrases de bords de mer puisées aux cris des mouettes 
Outremarines au bleu du petit jour
Elles ont l’éclat limpide des abandons 

Des mots à majuscules exsudent leur fureur sous le bonnet crasseux 
Il fonce droit devant
À chaque poussée du pied une écume de fiel
Des postillons qui claquent un regard en esquive hérissé de silences 

Le prince des resquilles agite sa béquille elles ont le souffle acide
Ces phrases courants d’air lorsque dans la caboche elles bourdonnent inutiles
Rimes chauffées à blanc
Sortilège de mots qui s’enroulent en cadence. 

Il ralentit l’allure et s’arrête 

Une benne dégueule les ordures de la veille
Il y jetterait bien les phrases du matin ces bavardages vains qui grignotent la tête 






Nadine Travacca vit à Chambéry et elle aime les mots, leur force et leur intranquillité. Les textes lus et reçus dans le silence, et puis les mots dits, portés par la voix, qui donnent à entendre une parole singulière. Présente dans les n° 31, 32, 34, 35, 36 et 37 de Lichen.

8 commentaires:

  1. Ho oui, c'est terriblement ça, la course à nœuds et à pulsions... Magnifique poème, transportant à deux sens ! Bravo à vous. Je cours parfois, marche le plus souvent, et des vagues de mots se ressassent ma tête.

    RépondreSupprimer
  2. Généreux et sensibles vos mots me touchent infiniment, Clément. Merci à vous pour ce très chaleureux partage.

    RépondreSupprimer
  3. Sensibles et complices vos mots me touchent, Clément. Merci à vous pour ce partage enthousiaste et chaleureux !

    RépondreSupprimer
  4. Mais c'est cela exactement, quand on court, que tout s'agite à l'intérieur, et en même temps ce sentiment vers la fin, d'être dégagé de quelque chose, allégé, en somme. Belle écriture.

    RépondreSupprimer
  5. Grand merci à vous pour cette belle connivence.

    RépondreSupprimer
  6. Il faut être patiente Nadine. Élisée n'est plus tout jeune et souffre de la chaleur(Si, si il le dit en éditorial).Pas question de course pour lui. Deux jours pour valider un commentaire c'est une bonne moyenne. Quant à son a(l)co(o)lyte Guillemet c'est blanc bonnet et bonnet blanc comme disait Georges Marchais. hihihi!

    RépondreSupprimer
  7. Ces mots qui se déversent par vague et qui vous submergent d'émotions.
    C'est magnifique !

    RépondreSupprimer