Mémorial

 

Deux textes d'Éric Jaumier

 

 

Bitume

 

rue Émile Combes soleil de plomb un type remonte la rue une gueule à la Bukowski d'ailleurs il dégaine une flasque éjecte un mégot boit une lampée cale de nouveau le flacon dans la poche intérieure de sa veste le bitume bouillant exhale une odeur pesante d'air lourd souillé notre homme n'en a que faire il va bon train la rasade l'ayant anesthésié de tout cela où peut-il aller avec une touche pareille une touche qui a tous les honneurs il pourrait faire un cagnard à réchauffer trois planètes sans doute levé à onze heures vingt quatre couché à quatre pour achever comme il faut une quille de gnôle s'amuser avec une beauté fellinienne.

 

 

Viviane un autre pavillon

 

elle m'est chère peut-être un air familier ou son pull assez long agrandi étiré un pull noir à la Robert Smith Viviane quel prénom un de ces prénoms qu'il faut arroser tous les jours d'une eau pure ou de tous les alcools à brûler le sang elle déambule elle s'arrête regarde vaguement en l'air ses lunettes sont au bout de son nez mais elle ne les relève jamais le hall le couloir les escaliers lentement à croire qu'elle ne sait plus ce que sont portes et fenêtres mais surtout Viviane coud ou tricote sans cesse d'une main tremblante dans le vide elle raccommode son itinéraire comme elle peut sa main thoracique puisqu'elle est  toujours là ne recoud pas son cœur non elle coud un semblant de vie d'air pur pour ceux d'autour.

 

 




Artisan électricien, Éric Jaumier était autant passionné de littérature, de poésie que d'espace et de temps, de voyages...  Il nous a quittés définitivement en juin 2020, alors que son recueil Blanc corbeauvenait de paraître aux éditions Jacques Brémond. Présent dans les n° 29, 30, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47 de Lichen, nous lui avons rendu hommage dans le n° 51 et continuons à publier (à titre posthume) des poèmes qu'il nous avait fait parvenir.

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