Marion Lafage


À Sète

Dans la bouche du mur j’ai passé ma langue
Elle s’est allongée de l’autre côté

De l’autre côté une voix m’a parlé
La langue de la mer sous les rochers

Sous les rochers le sable absorbe les ondes d’été
Poèmes à chapeaux et lunettes
Déclamés dans le soleil moiré

Dans le soleil moiré je nage à contre-jour
Jusqu’à la tombée des voix

Jusqu’à la tombée des voix quand s’allument les ombres
Notes étoilées de cithare entre les lauriers roses

Entre les lauriers roses rue Villaret-Joyeuse
J’aperçois les grandes grues
Sur l’eau couleur crevettes grises au lever du jour

Au lever du jour je suis encore muette d’amour
Et je vais nager à grands moulinets

À grands moulinets je parcours les flots
Sans penser au fond 
Les lignes sont nettes

Les lignes sont nettes en plein jour à Sète
Où les scènes joutent à mots découverts

À mots découverts dévalés des gosiers
Poumons et livres reliés
Dans les rues parsemées

Dans les rues parsemées d’échos et d’escaliers
Aux ivresses ascendantes j’ai passé ma langue

J’ai passé ma langue 
Elle s’est allongée de l’autre côté
Dans la bouche du mur.





Née en 1972, Marion Lafage a suivi des études de philosophie. Elle vit à Embrun (Hautes Alpes) où elle a découvert la poésie contemporaine par les éditions Gros Textes (chez qui elle dirige la collection « La petite porte ». Elle passe le DU d’animateur d’ateliers d’écriture à la faculté d’Aix-Marseille en 2017 et anime depuis des ateliers dans l’Embrunais. Publication de poèmes dans les revues Comme en PoésieDécharge, Paysages ÉcritsMéningeRumeurs ; participation à des recueils collectifs (L’Aude et ses poètes, 2017 ; 36 choses à faire avant de mourir, Pré#Carré éditeur, 2017 ; Tiers-Livre éditeur ; Carrés Poétiques 2, Jacques Flament éd., 2018 ; Un rêve, L’Aigrette, 2019 ; Écrits-Studios de Patrick Dubost, 2019). Présente dans les n° 23, 28 et 48 de Lichen.

1 commentaire:

  1. Belle figure de style pour ce texte qui...me donne envie de découvrir Sète ! Merci à vous.

    RépondreSupprimer