L’Atelier du don de mots


Les textes obtenus avec les mots donnés

Ce mois-ci, 45 mots (ou expressions) ont été récoltés, donnés par 23 lectrices et lecteurs, et 5 volontaires m'ont rejoint pour l'exercice. Je les en remercie !

Un reportage saignant aux Soleillades
La querelle à propos de l'almanach de la collection Vermeer avait débuté autour d'un couscous après un apéro à l'absinthe que quelques pistaches n'avaient pas vraiment épongé. Les unes étaient favorables à l'idée de mêler des œuvres modernes aux tableaux du maître qu'elles chérissaient, les autres trouvaient le projet déplorable et y étaient viscéralement opposées. Les ambitieuses étaient drivées par une péronnelle à tricorne victime de malnutrition, comme une mitochondrie d'anachorète, les classiques par une bougresse à barbiche au look carolingien. Les deux beautés s'enjaillaient à s'insulter en hurlant des poésies de bartavelle. Ça faisait du bruit dans la bicoque, à traverser la verrière et résonner jusque dans la masure du berger alpiniste. Elles se royaumaient, les pétasses érubescentes, à oiseler des piques fulgurantes. Ça n'y allait pas par déciles, et on explorait les dictionnaires pour quérir des mots doux pas ordinaires, dont bien souvent on ignorait les coordonnées.
La bagarre était inévitable, je ne vous en donnerais qu'un avant-goût: Les femelles s'agrippèrent par la toison, se flanquèrent des ramponneaux dans le sillon avant d'engager un combat à mort à coups de palplanches.
Je renonçais à filmer la suite.
(Éric Cuissard)

L’anachorète érubescent*
L’absinthe déplorable : y renoncer,
comme au couscous à la pistache,
à ces beautés si mal nommées
qu’on dit bougressespéronnelles ;
à oiseler les bartavelles,
... non moins qu’à la malnutrition !

Explorer et chérirme mêlerme quérir,
me royaumer et m’enjailler,
alpiniste ambitieux d’almanachs favorables,
berger de collections.

Sous ma toison, dans ma barbiche,
sans querelle hurler très viscéralement
aux avant-goûts de poésie, sous la verrière 
du ciel Vermeer,
dans la bicoque ou la masure, 
et, traversant les soleillades, par les sillons.

D’après le corpus disparate retrouvé depuis peu sous la direction éclairée de Guillemet de Päranthez et dont la mise en forme proposée ci-dessus n’est qu’une modeste (et incomplète) version possible eu égard à l’évidente difficulté de recomposition de l’original, celui-ci, sous réserve de confirmation médiéviste, pourrait se ramener à une liste de résolutions de vie d’un spirituel carolingien anonyme. Notons sans tarder plusieurs anachronismes (dus sans doute en partie à des contaminations transcriptives), dont le « ciel Vermeer », enjolivement très postérieur... Soulignons enfin et surtout combien  l’érubescence de notre anachorète couvre un large spectre émotionnel complexe traversé d’une ardeur tout humaine : de la rougeur contrite à la  vermeille joie, via une exaltation rayonnante... –  un spectre offert à la lecture singulière de chacun. 
(Tlemcen Gesgond)

Faut pas croire tout ce qu’on dit
Vermeer n’a jamais chassé la bartavelle !
Son père n’était pas plus berger que le mien anachorète. Quant à sa mère, l’imaginer croupissant dans une masure sans verrière ni palplanche, ce serait renoncer viscéralement à toute poésie intérieure.
Faut pas tout gober comme un gros sachet de pistache. Autant se prendre pour un alpiniste chevronné et tenter l’Annapurna en tongs. C’est pareil.
Je dis que la vérité est un souffle, une respiration et… qui est indispensable à cette acrobatie, je vous le demande ? 
Alors là, on fait moins les malins, même avec un almanach très documenté… y a déjà moins de monde au portillon, à ce que je vois… 
Alors, dites-moi, que serions-nous sans la mitochondrie ?
Faudrait pas passer son temps à se royaumer avec un tricorne bien vissé sur la cervelle en tripotant sa barbiche, geste favorable à la malnutrition poétique.
Il s’agit d’explorerla moindre bicoque, le moindre recoin, même carolingien, même sans coordonnée GPS parce que tout compte. Tout compte. On peut traverser une soleillade confortable, douce et tout le tralala. On peut s’enjailler avec la péronnelle et sa toison d’ores et déjà aimée. On peut demander au berger d’oiseler la bartavelle (Tiens, la revoilà, la bartavelle !) et faire collection de ses plumes et de sa décile sans être convaincue du bon usage de ce mot pas facile à placer dans un pique-nique mélangeant couscous et gobelet plein d’une absinthe bio. 
Il faut chérir la beauté simple d’une bougresse même si l’avant-goût de la première impression est déplorable car le plus ambitieux des projets ne trace aucun sillon si la fée que l’on a oublié de quérir n’apaise pas la querelle mièvre qui mijote. 
Et on verra bien qui se mettra à hurler dans la marmite insipide. 
Dans le bouillon, flotte une poignée de simples mais attention : qui s’y frotte, s’y pique et c’est la prudence qu’il faut mêler à l’audace même si l’octroi à payer est l’érubescence des sens.
Non, faut pas croire tout ce qu’on dit. 
(Sylvie Franceus)

(sans titre)
Palplanchemitochondrieérubescence, voilà bien des mots ambitieux !
Des mots pour gens à barbiche qui planchent sur l’almanach, se royaument à l’Académie et se mitent sous le tricorne. Au diable les anachorètes !

Plaise au ciel que je m’enjaille
sans querelle où me mêler
sans crise à faire hurler
sans déplorable bataille.

Bougresse de péronnelle
je renonce à la chérir
mieux vaut, par ma vie, quérir
soleillade et bartavelle

un avant-goût de pastis,
d’absinthe — servis gratis
avec un bol de pistaches
contre la malnutrition.

Potaches, ma poésie joigne ici la collection.
(Annie Hupé)

(sans titre)
L’anachorète traverse la bicoque en palplanche. La soleillade n’empêche pas la malnutritionAbsinthepistache et couscous, servis par une bougresse en érubescence, lui font chercher querelle plutôt que de se royaumer dans un sillon. Plutôt que de quérir le décile favorable ou la coordonnée, il hurle.
Autrefois alpiniste ambitieux, à la beauté d’un Vermeer, il s’enjaillait à oiseler la bartavelle en compagnie d’un berger ami. Il chérissait sa collection de tricornes, la poésie d’une masure carolingienne, digne d’un almanach. Mais une péronnelle, sous une verrière mêlant barbiche et toison, viscéralement lui donna un avant-goût déplorable de mitochondrie qui le fit renoncer. Il préféra partir explorer.
(Anaïk Simon)

Vous m'en r'mettrez un décile ?
Viscéralement, le tricorne ambitieux de Vermeer
traversa la beauté carolingienne de la verrière
parce qu'un berger anachorètehurlant
sa déplorable poésie de péronnelle,
renonçait à se royaumers'enjaillant
avec l'alpiniste, en avant-goût de querelle
sa barbiche érubescente pleine de couscous,
d'absinthe, de pistache et de bartavelle...
Mais sa bougressetout en explorant sa toison
où mitochondrie et palplanche se mêlaient
envoya quérir ses almanachs de collection,
et chérissant sa bicoque, sa masure au fond du sillon,
sans soleillade, ni coordonnée favorable,
oiselait obstinément sa malnutrition.
(Guillemet de Pâranthez)

3 commentaires:

  1. J'adore, j'adore, n'ai rien pu écrire ce mois-ci j'ai un chien aboyeur qui me casse les oreilles, c'est le chien de ma fille! et je cherche à le placer ! il prend trop de place! avis aux amateurs de jeunes chiens d'arrêt !!je veux bien garder la fille, mais pas le chien,!!

    RépondreSupprimer
  2. Bravo à tous ! Il me semble reconnaître une "espèce en voie de disparition", n'est ce pas Eric ?

    RépondreSupprimer
  3. Un enchantement pour les yeux et l'esprit, merci pour ce moment de poésie.
    Mon motdon: SCALAGOBUPHILE

    RépondreSupprimer