Jean-Claude Feuillarade

  


Le fleuve


L’eau des fleuves

presse mon corps

et contre des racines

lui fait des pantomimes de noyé.


Pécheurs

nulle part vos rires

pleins de l’ivoire des dents

n’ont eu le tranchant assassin

de vos hameçons

qui de mes chairs arrachent

ce qu’elles devaient aux poissons.


Il passe sur mes plaies

la promenade des amoureux

l’ombre des grands arbres

l’indolence des fruits mûrs

quand sur les berges

silencieux et mélomanes

des hommes veillent

au bain des femmes.


Mécaniques obscures

le rasoir des écluses

égorge le flot

sous l’ombre inusable

d’un pont.


Un marais étroit

tint lieu de mémoire

à la mémoire des eaux

tandis que le reste

infiniment ingrat

se jetait dans la mer.




Né à Nîmes en 1955, Jean-Claude Feuillarade suit d'abord une formation technique de la marine marchande avec la découverte précoce de la limite des langages du concret. Celui des mécaniciens, parfait pour la conduite et l’entretien des machines. Celui de la timonerie, parfait pour la navigation. Mais découvrant un infini du réel dans les poésies de Blaise Cendrars et non dans l’expérience des marins, il décide de ne jamais s’écarter de ces vertiges. Vit et travaille à Sète. Débute la photographie en 1973, puis le dessin et la peinture dès 1975 aux Beaux-Arts du Havre, puis de Marseille. Différentes expositions de peinture/photographies/travaux d’écriture. Présent dans le n° 85 de Lichen.


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2 commentaires:

  1. Le fleuve, cet obscur objet de mémoire. J'aime votre poème.

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    1. Frère ou sœur sensible je te remercie

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