Feuille à feuille
J’ai posé la feuille sans lui faire aucun mal
j’ai pensé dans le geste Le vent déloge toutes les couleurs
La trame du papier sous ma main cajoleuse je ne me souviens plus quand
Ni à quel moment de la vie se tisse ce dévouement secret
cette autre odeur du lait
si bien que j’ai prêté mon âme liseuse
ligne à ligne
à l’incertain des rencontres - toutes des premières fois
J’ai vu la feuille qui jetait l’encre
On le voit bien sur la photo que son encre a rougi entre
les mots d’une autre
À force de croire aux mots
aux feuille-à-feuille cornées
On plie le papier comme un coude
Malgré son bois fragile le chevet a porté mille tragédies àlavieàlamort
Jusqu’aux heures sans sommeil que l’on tirait au bord des yeux
(même maman l’avait vu que tu lisais la nuit elle était pas peu fière malgré la réprimande)
Pas peu fière la mère, sa fille a lu tout ça, personne jamais n’oserait prétendre avoir lu la moitié du dixième dans cette maison ou bien qui ?
Les pages noircies par tous les autres
Elle attend son tour.
Professeure de lettres modernes en Essonne, Isabelle Perciaux écrit et lit depuis toujours (et bien avant probablement). L’activité d’écriture prend sa place naturellement, portée par le souci de dire ce qui réclame de l’être, vivifiée par tous les passages — métaphoriques & euphoriques — que les mots permettent à qui les fréquente. La poésie… ? Sûrement un des rares lieux où l’indicible se révèle. Parfois. Pour cela, ne jamais cesser de lire-écrire. Présente dans le n° 35 de Lichen.
Beau texte, j'aime beaucoup "l'encre a rougi entre les mots d'un autre" la feuille d'automne marque-page devient poésie posée entre les feuilles du livre. Bravo, Gilles paquelier
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