Frédéric Abergel

 

Neige

 

Crissement de la goutte cristallisée qui descend, se dépose et te couvre. Perle après perle un grand fracas de manteau avalanche ta vie, t’enrobe d’une ouate épaisse et feutrée. Ton souffle se reflète dans le floconnement compressif au-dessus de ta tête. Son poids. Sa prise.

Tes pas sur la neige étaient puissants et véloces. Bien plantés. Illusoires.

Tu observes ton souffle qui volète et se heurte. Les fractalités de tes poumons emplis.

Tout froid oublié, tu entres en thermie.

Tu rejoues ton cri lorsque tu chutas.

Le silence est parfait lorsqu’il retentit.

 

°

 

L’accord parfait

 

L’accord parfait.

Arrime-toi au souffle de la vie qui s’invite. Artère ton cœur à la traîne des étoiles, à la poussière de la lune, libère une goutte infinie qui s’étend de la fin à la fin des deux mondes qu’elle unit. Liquide lien qui jaillit, moléculaire et filaire, corde vibrante d’unisson scintillant qui rive les continents.

L’accord parfait résonne dans l’éther.

Et puis tranche. Dégage. Entre deux mondes ferme le sas. Bloque l’amour. Choisis la terre. Rengaine ton âme. Encage ton cœur.

L’accord, parfait, ne dure longtemps.

 

 

 





Frédéric Abergel, enseignant-chercheur en mathématiques, voyage(ait) beaucoup, va souvent visiter les montagnes proches ou lointaines. Son « paradis » personnel est en Grèce. Signe particulier : marche, tout le temps, dans Paris, à la campagne ou ailleurs. Écrit depuis longtemps, publie parfois, poste sur http://gasteropode.org des billets consacrés à la marche et la gourmandise, et sur http://courts-ecrits.org des textes courts et poétiques. Présent dans les n° 68 et 69 de Lichen.

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