Bénédicte Bonnet


Chapeau de paille

Je possède, ô mortels, rêve si doux / si fort. Je recèle en moi-même une image profonde. Rêve de pierre. Tétanisant. Galvanisant. Pierre de lune, rôdeuse dans les étoiles. Lune aux tics / Lune aux tocs. Lune de pacotille, je suis. Lune de pierre / Pesante et lunatique / Oppressante / Je vois / Je pulvérise. Je brille dehors / Dedans j’obscure. Je flambe au jour / La nuit je… Je ne trouve pas. Je nuis / grave.
Grave tes nuits. Imprécations tenaces de ce rêve de pierre. Grave joyeusement, mon enfant, ma sœur, mon doux, mon bien-aimé. Noire en veuve, terriblement.
Car je vois. Oui, je vois ce monde chien. Ce vaste étrange monde. Je vois et je me démange tête. Laideur / ô Mortels / Hurlante laideur d’un monde dérangeant. Je vois. Je montre rien. Je vois :
Voleur / violeur / pourceau / sot / et le Beau tout autant.
Je vois / Yeux ouverts / Je ferme fenêtres de l’âme. Je m’appartiens.
Plutôt que regarder infâme horreur et débile beauté. Je passe. Je passe ce chemin. Détourne regard. Ô mortels je vous vois et ferme mon œil.









Bénédicte Bonnet est encore très amatrice en poésie mais très attirée par cette forme courte et condensée, brute et ramassée. Elle aime le baroque, ce qui bouleverse et ce qui tourmente. Elle est cette pierre très irrégulière qui ne demande pas à être taillée mais qui picote sans cesse. Ce texte est extrait du recueil Vanités (inédit). Présente dans les n° 28 et 29 de Lichen.

2 commentaires:

  1. Violence et douceur accolées. Beau résultat.

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  2. Si tu es bien la Bénedicte que j'ai connue, et je crois bien que tu l'es - toutes ces années n'ont rien ôté à ta profondeur sombre qui ruisselait déjà. Des images fortes et une vibration qui effraient et attirent, un flux de vie et de noirceur. J'aime beaucoup ce texte et ne suis pas tout à fait d'accord avec la présentation en bas de page... "très amatrice en poésie"... Isa

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