L’envol des grues frileuses
Sonnet (I, 1)
À Pierre Vinclair
Pour trouver son chemin dans d’épais marécages
D’eau, de sucre et de sang il faut, l’esprit tendu
Sans se désorienter, lire ahuri ces pages.
C’est, lecteur, un défi à la logique ardu.
N’essaie pas sans rigueur ce poison pour les sages
Qui seuls sauront goûter ce fruit qui leur est dû.
Mieux vaut ne pas rester, crois-moi, dans les parages
D’un livre aussi macabre. As-tu bien entendu ?
Va, talons en arrière et non pas en avant,
Imiter par ce choix l’envol des grues frileuses
Qui vont, triangle ailé, dans l’air en méditant
Sur l’hiver quand, soudain, le vent se fait si fort
Que l’oiseau vigilant, face aux nues orageuses
S’incline et vire à temps, sûr d’éviter la mort.
°
Génie
Épigramme (I, 4)
Je n’écris pas pour être applaudi,
Moi. Mon génie sert la cruauté.
Hautain, cheveux dressés, je dédie
Mon œuvre hideuse à l’humanité.
Né en 1993, Siméon Lerouge vit dans la Sarthe, près du Mans, où il se consacre à l'écriture. Les poèmes ci-dessus s'inspirent des célèbres Chants de Maldoror écrits par Lautréamont. Ce sont des variations, des traductions de prose française en vers français, le plus souvent dans des formes fixes anciennes. Contact : si.lerouge@laposte.net. Blog : https://vie-generale.blogspot.com. Présent dans les n° 28, 33, 38, 43, 66, 67 et 72 de Lichen.
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