René Chabrière

 

 

Des idées moulées sur la forme des pierres

 

Nos langues épépinent un fruit oublié

dans l'ombre des nuages.

Elles parlent  trop,

et les mots qu'ils désignent

ne se rapportent à rien.

Nous marchons sur le goudron

où brûlent les  étoiles,

le visage entouré de chiffons.

 

L'encre me collera aux doigts,

et je n'oserai décrire ce que je ne vois pas.

Les mains  sont humides, pourtant,

bien qu'elles ne donnent à boire

que des phrases sèches.

Il sera difficile d'y puiser quelque nourriture

car l'esprit ne nourrit pas le ventre.

 

Il tire sa substance d'idées moulées

sur la forme des pierres

charriées par les fleuves.

Le tout se situe dans une époque

encore inconnue,

car ce que j'écris n'a pas encore eu lieu :

le poème n'est pas encore lu.

 

Il se pose sur mon esprit

comme une  couronne  d'épines.

Le sang qui viendra aura la couleur

du papier sur lequel viendra se poser

l'ombre de sa fièvre.

Il ne sera pas possible de l'écrire

sans  ressentir la douleur

de ce fruit gris et écartelé.

 

 

 

René Chabrière, peintre et poète, vit en Lozère. Son site : https://ecritscris.wordpress.com. Présent dans les  n° 28, 30, 76, 80 et 85 de Lichen.

 

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