Paul Konstantin

 

Le cœur

 

Je n’ai pas de cœur.

Je veux dire pas d’empathie.

En plus je suis susceptible.

Je prends mal les choses.

Vous allez me dire c’est contradictoire avec le fait de ne pas avoir de cœur.

Je mets une main sur mon cœur.

Il bat. Lentement.

Tranquillement.

J’essaie d’aimer mes gestes.

Pour les aimer il faut que je me sente danser.

C’est une danse intérieure.

Je ne sais pas si quelqu’un en a été témoin.

En plus je ne m’aime pas.

Enfin, d’après ce que j’ai compris.

Je ne m’aime pas assez.

Mon moi n’est pas assez fort.

Il désire trop peu, si peu, pas assez.

Je ne peux pas désirer tout le temps.

J’ai des non qui passent par là.

Ou des horizons qui rendent mon je invisible.

Il n’existe quasiment pas.

C’est pour ça que je mets des je partout dans mes poèmes.

 

C’est fou la pression.

Il faut nourrir le cœur.

Il faut s’empresser dans les caves, aux sommets des tours de diffusion.

Il faut multiplier les interconnexions, les relations.

Densifier le réseau.

Nourrir le cœur pour qu’il palpite si fort que cela irradie à la périphérie, même à l’extérieur.

J’aimerais tenter un système avec plusieurs cœurs.

Ils auraient chacun leur unicité propre.

Ils se parleraient.

Ils se sentiraient.

Ils se toucheraient même.

Mais le risque c’est que tous ces cœurs s’agrègent en un supra cœur…

Central.

 

 



Après avoir été ingénieur automobile pendant quelques années, Paul Konstantin suit la formation de l'Atelier International de Théâtre, puis devient comédien. C'est là qu'il sent la nécessité de dire et partager les poèmes de Michel Houellebecq. Depuis, il écrit sa propre poésie. Présent dans les n° 42, 43, 44 et 45 de Lichen.

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