Pierre de Rosette (3)
Tu te couches toujours sous ta perte. Je m'en vais
toujours sous mon désir.
Notre don : pouvoir parler aux moineaux qui se
posent, aux vipères qui se cachent. Leur raconter tout de nous. Jusqu'à ce
qu'ils ou elles s'écartent. Et trouver le chemin de la quête.
Se dire : si la quête aboutissait un jour, il
n'y aurait plus rien. Le but, c'est la Voie, et la Voie, tel est mon chemin. À
peine scribe de la luciole.
Cheminer avec l'Autre c'est, sans se laisser broyer
par la vie, y projeter des larmes et des fous rires et frapper son prénom sur
un seul médaillon. Fils unique de la pluie et de l'arrière-soleil de novembre,
des printemps se chuchotent à ton oreille. Absolus.
S'absoudre de la poésie rogue et de ses chiots de
mauvais augure, coincés dans leur propre cage d'escalier, et qui jappent,
pleurent et bavent de rage, et écrire dans le retrait d'une chambre. Avec cette
vue sur les tours là-bas. Que le rose saigne plus lent. Profondément ancré dans
la transparence d'une vitre où jouer sa vie. Avec ces nuées d'étourneaux comme
autant de vaguelettes désespérées, toi aussi tu souffres au ciel. Tu te résumes
à un trait – une question – une énigme...
Et, si toutefois tu aimes encore, laisse-moi
t'écouter parler toute la nuit. Dis-moi la vérité à l'aube quand moi je pousse
un bras hors des draps. Quand moi je traverse les murs.
Oui, ma mère est la lumière. Une bouche en guise de
père, et puis un bâillon. Où est ton père ? Où est ta mère ? Le jour
se lève. Je songe à eux qui luttent. Dans le bleu qui s'amorce, je pense à eux.
Qu'un oiseau ponctue cela, carlingue défroissée,
point-virgule, puis tiret.
Nicolas Jaen réside à Toulon, où il est né en 1981. Livres publiés
(entre autres) : La nuit
refermée (L'arachnoïde), Les
éblouis, roman (MLD), À port
de temps (collectif), Ce
chant éloigné, Coquelicot,
autoportrait froissé et Livre noir (tous 3 à l'Atelier des Grames).
Présent dans les n° 10, 22, 23,
24, 26, 27, 28, 29 et 30 de Lichen.
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