Arrêt sur un (non) souvenir : l’histoire du bouquet des églantines abandonnées
Porte claquée, deux corps se séparent
un véhicule ronflant s’éloigne
disparaît dans le brouillard
elle, seule, n’arrive pas à dormir
le bouquet d’églantines est éjecté dehors
sur le préau, il pleut
les fleurs abandonnées se fanent gémissent pleurent en silence
cris étouffés par la pesanteur de la nuit orageuse
étrange odeur de brûlé
roses froissées qui se décomposent.
*
Le soleil se lève
comme s’il n’avait pas plu la veille au soir
elle, chagrinée sans repères souffre de migraine
son sein gauche est douloureux, ses cris sont stridents
porte ouverte, elle sort pour respirer un peu d’air frais
trébuche sur le bouquet des églantines abandonnées
fleurs méconnaissables.
*
Mémoire fracturée, souvenirs qui se bousculent, brouhaha
en vain, elle ne se souvient pas de l’histoire de ce bouquet réduit en une rose esseulée
une églantine, une seule, (sur)vivante
rhapsodies de nature morte
qui pleure de ses paupières
des pétales jaunâtres trouées de chaudes larmes et d’oublis.
Nessrine Naccach est chercheuse en littérature comparée, chargée de cours à la Sorbonne Nouvelle. Elle s’intéresse aux poétiques croisées et à la rencontre des langues. Elle dessine, fait des collages, écrit des textes (proses et poèmes) qu’elle ne publie pas (elle cherche toujours à comprendre pourquoi). Depuis peu, elle a pris son courage à deux mains parce que les mots sont plus beaux quand ils sont partagés. Présente dans le n° 68 de Lichen.
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