Lucien Guignabel

 

Les serres lentes du froid

 

Les franges du soleil se disloquent au soir ;

les serres lentes du froid 

agrippent le cœur de la forêt.        

 

Les vies minuscules se recroquevillent 

aux creux des chemins d’écorce,                               

s’enfouissent sous l’amoncellement des feuilles mortes,

s’enterrent entre les racines.

 

Les lames de la nuit 

vont entailler les manteaux dérisoires,         

tuer au plus tendre, 

au plus près.

 

Nul souffle de vent ;

la lutte s’engage dans le pur silence

pour tenir jusqu’au prochain midi.   

 

°

 

Le silence des pavés 

 

La lune se faufile,

glisse sur le silence des pavés glacés,           

ses éclats humides me précèdent.             

 

Je cherche les pas de celle 

qui me quitta au bord d’une semblable nuit, 

il y a bien longtemps,

ou alors à l’instant, je ne sais plus vraiment ; 

ma mémoire mouvante flotte, balbutie    

à travers un ocelle égaré dans la bruine.      

 

Je revois l’extrémité d’un quai,

un canal de brouillard ;

notre amour brûlait son herbe noire.

 






Né en 1957, Lucien Guignabel vit dans le sud de la Vendée depuis une trentaine d’années. S’intéressant à toute forme d’écriture (poésie, nouvelle, roman), il est l’auteur de plusieurs recueils de poésies chez L’Harmattan et Unicité et il vient de publier un roman aux éditions de la Veytizou. Présent dans le n° 68 de Lichen.

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