Les auteurs parlent de Lichen

 La centième

 

 

 

 

 

Mahé Boissel

 

 

Quand j’eus six ans, mon père m’offrit un cadeau de « grande » : trente-trois tours à son bras sur une pointe de diamant. Mon bal débuta en tourbillon dès la première piste de ce récital de poésie ; j’entrai — sans tous les connaître — dans la maison des mots en compagnie de Prévert, La Fontaine, Louise Labé, François Villon, Tristan Derême, et tant d’autres à découvrir Il y a quelques années une amie poète me parle de la revue Lichen et de son directeur Élisée Bec. Je ne connais du porteur de ce bel hétéronyme * que son incroyable travail, son élégance et le chaleureux accueil qu’il réserva d’emblée dans sa revue à mes mots à mes dessins ; un homme d’immense générosité.

Par la grâce d’un don de mot au magique pouvoir de mot de passe tout un chacun peut, chaque mois, accéder à la lecture du dernier numéro mis en ligne. 

 

Ainsi se renouvelle l’enchantement de mes six ans : j’entre dans une forêt touffue mystérieuse à la rencontre d’inconnus de bonne compagnie, je découvre leurs textes – que j’aime ou pas – mais toujours mes yeux brillent à chaque promenade. J’ai rencontré les mots de Nadège Cheref dans la revue Verso avant de les lire dans Lichen et bien avant qu’Élisée ne lui passe le flambeau de directrice de la publication.

 

Je me réjouis de fêter aujourd’hui avec elle et vous tous l’âge honorable de ce Lichenindéfectible et résistant qui allume sa centième bougie poétique.

 

Merci Élisée.

 

Merci Nadège.

 

Longue vie à Lichen en Poésie !

 

Nous savons tous que le récital des mots n’a pas de fin chez les humains.


* hétéronyme choisi en hommage à sa grand-mère et au géographe anarchiste Elisée Reclus (lire à ce propos le bel interview de Pierre Morens dans sa revue Infusion).



 

Dessin santé - Mahé Boissel

 






 

 

Alain Dambreville

 

 

La centième de Lichen.


Février 2016,


Élisée Bec crée une nouvelle revue poétique avec l’aide de Polo l’infographiste : Lichen.


Dès l’origine, 
Élisée fixe les principes qui ont fait son succès :


« Nous ne publierons que des textes que nous aurons profondément aimés, qui nous auront, d’une manière ou d’une autre, de près touchés. 
Notre ligne éditoriale sera donc faite de plaisir, d’amitié, de simplicité, de sobriété, de clarté… Nous avons envie de privilégier la forme brève… Comme nous sommes de grands consommateurs de mots, nous demandons que chaque personne qui consulte nous envoie, en échange, un mot (le don des mots). »


Dès les premiers mois, enthousiasme général des lecteurs poètes : — « J'ai découvert votre revue 
Lichen il y a peu de temps (…) Tombée sur des textes percutants, formes courtes, ça résonne. » — « Bravo pour ce quatrième numéro, très beau. La navigation est très facile et intuitive, et la lecture est très agréable. La revue Lichen est véritablement une réussite. Je suis fier de figurer au sommaire. » Ou encore : — « Merci pour ce bel endroit de poésie et d'inspiration que je découvre avec enthousiasme ce matin (…). Quelle simple et surprenante idée de faire un don de mot, don de soi partiel et total. »

D’autres déclarent adorer le symbole du lichen… : « Lichen est un titre incroyable. Cela fait plusieurs semaines qu'il m'accompagne, c'est un poème à lui tout seul. Un poème horizontal, allongé dans un seul mot ». Un autre : « Le lichen pousse là où aucune plante ne peut vivre : en haut des montagnes, sur les rochers du bord de mer, sur la lave refroidie… Il accroche un ardent désir vital aux contrées les plus hostiles ».


Depuis, année après année, nous sommes fidèles à « notre » 
Lichen.


C’est ainsi que nous avons la joie de fêter la 100ème de 
Lichen. Succès exemplaire et éminemment sympathique que l’on doit à Élisée Bec et, depuis un an à Nadège Cheref qui l’a remplacé avec talent et dynamisme.


Merci mes amis. Nous prenons un plaisir immense chaque premier du mois à découvrir ce que vous nous avez concocté. Nous dégustons ces pages de plaisir et d’amour (lichen vient du grec leikhêin lécher). Et, le 15 de chaque mois, nous recevons « le don des mots », autre instant de fête. Deux orgasmes par mois, à mon âge, c’est inespéré.


Vive 
Lichen, vive Élisée et Nadège, vive les talentueux contributeurs, vive nous les lecteurs !



 

Romain Frezzato

 

 

 

 

d’un qui
niche au large –
collecte les
dire d’ici. partout :
phénomènes curables.
carie des bouches et du vivre –

lichen
léché
par qui palpite.

 

 

 

 

Jean-Claude Hérissant

 

 

Lichen !

 

Longue-vue !

Môle 

contre la folle foule-haine

Môle

pour l'havre de paix recouvrée

 

Lichen ! 

 

Rempart 

contre la mortifère gangrène 

Port 

pour l'insulaire amitié 

 

Lichen !

 

Repoussoir

de l'idée rampante-fascisante

Reposoir

de l'amène pensée aimante

 

Longue vie à Lichen Revue!

 

Oblongue langue de vie

Salutaire

Sel des larmes 

de toutes les mers

 

Lagune entre ciel et terre

Au lent ressac 

des vagues à l'âme 

aurifères 

 

Longue vie à Lichen Revue!

 

 

 

Pierre de La Fontaine

 

 

Lichen, c’est un espace où l’on se mesure à l’encre, écoute le peu qui parle, traque le mot rétif, se saisit de l’appel du Verbe ; un murmure dans la cacophonie du monde.

Lichen, c’est une parole libre.
Face à l’indécence qui s’empare de l’intime, l’arrogance de la consommation, le cynisme de la communication, la logique du divertissement, Lichen porte poème et chemine sur des sentiers
inexplorés, se risque sur des terres arides, inexplorées.

Lichen, c’est un rempart contre la standardisation de la pensée, l’appauvrissement de la langue, la modélisation des esprits. 

Lichen trace son sillon, en refusant de se soumettre à l’ordre mercantile et
aux lois du paraître. Loin de l’immobilisme des certitudes, de la recherche permanente du consensuel, Lichen est multiplicité, mouvance et explore la profondeur, l’énigmatique, la complexité du réel.

Lichen, c’est une audace, une expérience, une quête de sens, une urgente nécessité, une posture qui repousse l’engourdissement des sens, 

qui réveille les consciences et l’attention à tout ce qui fait Vie.
Lichen se saisit de chaque miette du présent et fait une place à l’appréhension physique et sensible du vivant, à l’heure du règne du virtuel.

Lichen, c’est un lien, une voix pour nos fragilités, nos contradictions, nos doutes.
Dans la frénésie de la technologisation, c’est un lieu où l’on interroge, 

où l’on donne à éprouver, où l’on se ressource.

Lichen, c’est une respiration, une lumière qui veille.

 

 

 

Phil Powrie

 

Lichen … d’abord le nom, si évocateur, qui nous pousse au symbole. Pour Colette, les pierres couvertes de lichen « sont les souvenirs des générations passées » ; pour Proust, « les murs de Combray, ornés de lichen et de mousse, semblaient garder les secrets d’une époque révolue » ; pour Flaubert, le lichen est « une carapace de vie qui résiste au temps ». 

 

Il en est ainsi de la poésie, qui se construit de souvenirs et de secrets enfouis au cœur des mots qui résistent au temps. 

 

Mais il y en a bien plus ; passons du symbole à la métaphore.

 

Pour les scientifiques, le lichen est utile et nécessaire : il est bioindicateur de la qualité de l'air ; il sert de nourriture et d'habitat pour diverses espèces ; il a des propriétés antibactériennes, antivirales et anti-inflammatoire ; parce qu’il fixe l'azote, il enrichit les sols pauvres ; il aide à stabiliser les sols et les roches, réduisant ainsi l'érosion par le vent et l'eau. Enfin, il est un excellent exemple de symbiose, montrant comment différentes espèces peuvent vivre en harmonie et bénéficier mutuellement.

 

Durant ces dix dernières années, c’est bien ce que fait admirablement la revue Lichen

 

En elle, co-existent les voix différentes, venues d’ici, venues d’ailleurs, des voix qui nous permettent de fixer les sentiments d’une époque, qui enrichissent la vie quotidienne. La revue Lichen est une nourriture de chaque jour, sans laquelle la vie serait démunie, un sol bien pauvre.

 

 

Aurélien Clappe

 

autant d’écritures

que de poètes

autant de mots 

que de visions

le lichen 

qui sublime les rochers

la terre & le désert

m'ouvre les yeux

je le lis

il me relève

envie d’écrire

le cœur battant 

mais pas de quoi

se faire un 100 d’encre

 

 

 

Dorothée Coll

 

 

Merci à la revue Lichen !


Dans les pages grises et blanches de la revue lichen, on évolue sans bruit et en confiance. On se côtoie et se découvre. C’est un passage, un chemin, un terrain où l’on teste parfois pour la première fois ses mots. Merci à 
Élisée pour l’avoir initiée et fait vivre pendant des années et à Nadège pour avoir repris le flambeau.



 

Mokhtar El Amraoui

 

 

 "LICHEN"  BIVOUAC D'AMOUR ET DE PAIX !

Apporte donc ton flambeau et, de la nuit la plus sombre, renaîtra la plus belle des lumières, celle de l'amour naviguant sur les eaux de la paix !


C'est ce fluide de bivouac qu'à toujours entretenu la revue Lichen avec ce si bel espoir poétique entêté porté par Élisée, puis  Nadège continuant l'infatigable danse où en voix de  poèmes divers se dessinent tant de volcaniques pas fusionnant en bouquets de chants de joies et d'envols jugulant leurres et douleurs.


La centième de la revue couronne une épique détermination farouche entretenant le feu sacré de la poésie dont l'athanor peut offrir l'élixir pour un véritable salut vers une réconciliation cosmiquement ontologique de l'être humain avec tous les autres êtres.

 
C'est grâce à de telles volontés licheniennes que la lumière retrouvera ses ailes pour chasser les assaillantes obscurités.


Longue vie, Lichen !



 

Gérard Leyzieux

 

 

En ce qui me concerne, j’ai commencé en septembre 2017 et, depuis, je n’ai pas cessé d’apporter quelques pigments à l’extension de ce Lichen verbal qui, aujourd’hui, occupe une place de choix dans le paysage médiatique de la poésie francophone. 

 

En effet, cette revue offre des particularités qui la rendent attrayante : ouverte aux débutants [« aux textes (…) qui nous auront de près touchés » (éditorial du n°1)], elle ne privilégie aucun élitisme, ni esprit de clan ; un volume d’une quarantaine de pages environ permet, en se ménageant une plage horaire spécifique, de la lire en continu ; étant mensuelle, sa page « Annonce » délivre des informations véritablement d’actualité. Moi, je la lis « goulûment » le 1erde chaque mois.

 

J’ai pu y découvrir de belles plumes et — c’est un peu plus récent — attendre désormais chaque« Note de lecture », perçante et juste, de Didier Gambert dont Élisée Bec a fidélisé la présence au sein de la revue. Élisée est un voyageur et a publié ses numéros de multiples endroits à travers le monde. Je ne suis pas sédentaire non plus et cette souplesse de visibilité, que nous

accordent les moyens techniques du XXIe siècle, est considérablement appréciable. Être ici ou là-bas, lire du lointain ou de plus près, cette élasticité constitue un précieux atout pour tous.

 

Depuis juillet 2023, Nadège Chéref, sans bousculer l’ordre habituel de la revue, lui apporte satouche personnelle. Lourde charge pour elle que de gérer continuité et évolution. Le passage en douceur est réussi me semble-t-il et je voudrais, ici, remercier et Élisée et Nadège pour le travail accompli et en accomplissement. Que le Lichen continue à ramper encore longtemps

sur l’écorce des mots.

 

Un amical salut également à Colette Daviles-Estinès.

 

 

Parme Ceriset

 

 

À l'occasion de ce centième numéro, je tiens à remercier chaleureusement la revue Lichen pour la richesse et la diversité des textes publiés, pour leur engagement à promouvoir la poésie dans un monde qui en a grandement besoin, pour leur humanité et leur gentillesse. 

Merci et longue vie à Lichen !  

 

 

Didier Gambert

 

Tout arrive, et parfois le meilleur. Dans un monde où rien ne dure, où tout passe, trépasse, disparaît, il arrive qu’un peu d’obstination et de patience produise plus d’effet que des déclarations d’autant plus éphémères qu’elles ont été plus tonitruantes, et que ce qui semblait fragile à l’origine s’implante et fasse souche…

Sans doute la revue doit-elle sa longévité à la nature même du lichen dont elle tire son nom. Cet organisme très complexe est connu pour son aptitude à s’implanter et à vivre sur les supports les plus hostiles. C’est le sens de la citation placée en tête de la revue : 

Le premier signe de vie à revenir

Sur les blocs de lave refroidis

C’est le lichen

Sans doute y-a-t-il eu dans l’esprit du fondateur cette idée selon laquelle la poésie est un art de la résistance : résistance à l’effacement, résistance obstinée à l’abrasion de l’époque, dur désir de durer, affirmation implicite d’un certain nombre de valeurs, en particulier la foi en l’excellence de la parole poétique, en son actualité, alors que tout semble lui signifier de se faire humble et de disparaître à jamais de l’esprit des hommes.

Au profit de quoi ? de quel présent ?

 

Fondée en mars 2016 par Élisée Bec, la revue Lichen publie aujourd’hui son centième numéro. Au début, huit poètes et poétesses figuraient au sommaire : Colette Daviles-Estinès, Sabine Venaruzzo, Joëlle Pétillot, Éric Dubois, Simon Dépalles, Fabrice Marzuolo, El Angelraya, Guillemet de Parantez.

Ce furent les pionniers. À noter : Colette Daviles-Estinès est présente dans chaque numéro sans exception depuis le début de l’aventure.

La revue a rapidement adopté un rythme de croisière. Les huit poètes publiés au départ se sont en quelque sorte multipliés. Dès le numéro 21, en effet, 45 poètes sont publiés, puis, devant le succès rencontré, mais aussi pour des raisons pratiques, le nombre des poètes publiés chaque mois passe à 30 ou 31, selon le nombre de jours du mois de publication… La revue donne ainsi la parole à un poète par jour.

Le principe est simple : tout un chacun peut envoyer des textes à la revue. Le choix de publier est effectué par le directeur de publication, en fonction de critères éminemment personnels, tels que le goût, le plaisir ressenti à la lecture, etc.

De fait, la revue a publié à ce jour 702 auteurs et continue à en accueillir de nouveaux.

Cela ne va pas sans quelques drames : la revue a rendu hommage à l’un de ses fidèles, le poète Éric Jaumier, disparu prématurément au printemps 2020, qui avait eu le temps de publier deux très beaux recueils, Les Lisières (Le Petit véhicule) et Blanc Corbeau (Jacques Brémond). Tout en discrétion et en finesse, il faisait entendre une voix singulière et rare, pleine d’émotion vraie, exprimée en peu de mots choisis avec une grâce singulière qui n’appartenait qu’à lui.

La revue Lichen se veut donc l’expression d’une communauté vivante, riche de sa diversité, de ses promesses.

Élisée Bec, à qui j’adresse un immense « merci », a dirigé la revue pendant plusieurs années, avant de décider de « passer la main ». Nadège Chéref préside désormais aux destinées de Lichen, mais l’on imagine volontiers que son fondateur historique suit toujours avec attention l’aventure de notre petite revue aux lignes grises et noires.

 

 

 

 

 

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