L’Atelier du don de mots



Les textes obtenus avec les mots donnés

Ce mois-ci, 50 mots (ou expressions) ont été récoltés, donnés par 24 lectrices et lecteurs, et 9 volontaires se sont coltiné l'exercice : qu'ils en soient vivement remerciés et félicités — d'autant plus que ce feignant de Guillemet a profité de l'absence du patron (parti au soleil) pour s'endormir dans le hamac ! 


Avant un grand départ
Sauvegarder intailles marmoréennesrefuges d’hyperboréepaillassons de cordelette un point à l’endroit un point à l’envers.
Tintinulant d’inventive berlue, ne plus saliver sur la jolie qui passe, sans vergogne traitée de cocotte pimpelochée en maxi-chaleur modèle  Big Bang, de trompeuse Faloppe (cas de pelure sur la langue), de piochepunaise au pissenlitjubilé de gendarme de soixante-huit à rouflaquettes parfum muguet et térébenthine dansant en toute constipation la salsa des verge(t)ures.
S’adossers’ouvrir à réparer fractures de cubitus et autres, relever les fragments des bagarresreconstruire, rebâtir un bercail.
Plus tard, mais,  sapristi ! sans errer dilettante
mériter d’arpenter, visiter d’autres mondes,
par exemple un Viet-Nam et solaire et fleuri.
(Clément G.S.)

Madame la Fée
J'arpentais le paillasson fleuri d'une friche, pioche en main, à la recherche de pissenlits, lorsque relevant les yeux je la vis. De fait, je l'entendis d'abord : « Un point à l'endroitun point à l'envers », marmonnait-elle, et, recomptant ses mailles : « soixante-huit, c'est bon ! » Derrière elle, s'allongeait une cordelette. Sapristi ! une Dame Blanche ! Blanche comme du muguet. Marmoréenne, sans doute aurait dit le poète mais la chaleur qui suivait son passage, son visage pimpeloché de blanc comme ces danseuses du Viet-Nam, enfin de par là-bas, l'intaille qui tintinullait sur sa poitrine même : tout en elle était solaire. Un big-bang dans ma tête, sacrée salsa. Elle disparut aussitôt dans une odeur de térébenthine que je voulus sauvegarder dans une cocotte, ainsi que quelques fragments de laine, pensant pouvoir reconstruire la vision une fois rentré au bercail.
J'errais longtemps dans le champ, tirant sur mes rouflaquettes. Non, je n'avais pas eu la berlue. Certes, une fracture du cubitus m'avait un peu collé des punaises dans le plafond et un psychiatre inventif, le docteur Faloppe— un gars qui ne se trompe jamais — avait dû me rebâtir la bagasse en s'appuyant sur les vergeures restées intactes dans mon cerveau, avant que je puisse m'ouvrir au monde en m'adossant à un refuge de jour. Mais bon, je ne salivais plus et ne mangeais plus sans vergogne les pelures dans les poubelles, d'autant que cette pratique m'avait filé une méchante constipation. Pourtant, racontant mon histoire aux gendarmes, j'eus droit à un séjour au gnouf. Bon, c'était pas Hyperborée, mais moi j'avais vu la Dame Blanche ! Peut-être en venait-elle d'ailleurs, chargée en dilettante de réparer les liens entre nos deux mondes en tricotant son fil jusqu'au jubilé de nos retrouvailles. 
(Éric Cuissard)

(sans titre)
Qui a dit qu'on avait évité le big bang en soixante-huit ? C'est vrai que si les choses avaient mal tourné, on aurait pu s'enfuir et par exemple aller arpenter le Viet Nam pour y chercher refuge.
Je ne croyais pas si bien dire avant de lire dans une vieille pelure trouvée au fond d'un carton et fermée par une cordelette, le récit de l'aventure initiatique et solaire d'un gendarme qui avait déserté notre pays à la suite des fameux « événements ». Le bonhomme avait quitté le bercail et définitivement décroché les semelles de son paillasson pour se reconstruire en dilettante une autre vie. Sapristi, il avait quand même su relever un défi pas ordinaire et, sans vergogne, oublier ses rouflaquettes et son eau de toilette senteur térébenthine et pissenlit pour quitter ainsi ses habitudes et plonger dans un pays inconnu. 
Au début, il avait quand même un peu errés'ouvrant timidement – un point à l'endroit, un point à l'envers, aurait dit ma grand mère – à de nouveaux us et coutumes. Se révélant finalement très inventif, il avait rebâtifragment après fragment, à coups de pioche parfois, une masure dont il avait fait un habitat confortable. Son abri marmoréen ingénieusement réparé en aurait donné la berlue à plus d'un. Tous ses efforts lui avaient quand même coûté une fracture du cubitus et quantités de journées de constipation, on n'a rien sans rien ! 
Les photos accrochées par des punaises aux pages du carnet font saliver : on l'y voit siroter un verre de bagasse à la vergeure dans la chaleur fleurie des muguets
Et dans un coin de ce cliché sauvergardé, on aperçoit une femme,  une cocotte bien pimpelochée dansant une salsa hyperboréenne. Aussi bien installé et entouré, notre homme a-t-il pu fêter le jubilé de son exil ? C'est ce que le récit ne dit pas.
(Annabelle Gral)

Retour à la case départ
Les rouflaquettes huilées de térébenthine,
Je salive sans vergogne
Devant une salade de pissenlits fleurie de muguet.

Sapristi ! Qu’il est bon de rentrer au bercail ! 
Soixante-huit mois qu’un Big Bang m’a fait quitter ma douce
Pour une créature solaire qui dansait la salsa.

J’ai erré, j’ai arpenté le monde à la recherche de je ne sais quoi, sans jamais faiblir,
Pendant qu’elle réparait, un point à l’endroit, un point à l’envers,
Un tricot troué que je lui avais offert.

Cocotte m’avait promis
Un fragment d’elle-même
Mais son jubilé est arrivé

Et en dépit de mon caractère inventif
Je n’avais toujours pas accédé 
À ses trompes de Fallope.

Elle eut beau m’aguicher, s’adosser à la balustrade, 
La jupe relevée, les lèvres pimpelochées et la voix charmeuse,
Mon cœur ne put s’ouvrir.

Je décidai de reconstruire mon mariage.
Je rentrai à la maison escorté par deux gendarmes
Ma pelure infestée de punaises.

Ma femme eut la berlue
Heureusement elle sait encore cuisiner les fleurs et les assiettes creuses sont réparées,
Ainsi,
Les rouflaquettes huilées de térébenthine,
Je savoure sans vergogne
Une salade de pissenlits fleurie de muguet.
(Gaëlle Moneuze)

Se relever du Viêt-Nam
Rouflaquettes sur visages marmoréens, les gendarmes arpentaient un fragment de soixante-huit. Sans vergognesalivant devant la cocotte et s’adossant au bercail de Faloppe, ils laissaient tintinnuler leurs muguets.
Ils avaient la berlueErrant sous des effluves de térébenthine, les pissenlits fleuris autour du paillasson leur faisaient oublier constipationfractures du cubituspelures pimpelochées.
Reconstruire un refuge solaireréparer à coups de pioche sous la chaleurrebâtir loin des punaisess’ouvrir tel un Big Bang. C’est en dilettante qu’ils se retrouvaient à l’hyperborée du monde loin de la salsa et des cases de bagasses. Ils auraient dû sauvegarder le papier à l’intaille de vergeure, qui dans un inventif jubilé, leur ferait, ici, fabriquer une cordelette un point à l’endroit, un point à l’envers… Sapristi !
(Anaïk Simon)

Arpenteurs solaires
un point à l’endroit, un point à l’envers
les punaises du pissenlit
rebâtissent leur bercail
dans une hyperborée fleurie
pimpelochés comme des gendarmes

Inventive
reconstruire dit-elle
la fracture du cubitus
dans des vergeures et de la bagasse
sapristi ! ça tintinulle
sauvegardons, réparons !
par la pioche et la cordelette

La cocotte de Faloppe
on l’appelle térébenthine
des dilettantes à rouflaquettes 
errent et salivent
paillasson en chaleur
son muguet va s’ouvrir
Big Bang !

Intaille marmoréenne
c’est Jubilé pour Soixante-huit
on s'en est relevé avec la berlue
sans vergogne pour le Viet-Nam
le refuge c'est la salsa on s’adosse
fragments, pelures et constipation
(BMB)

Rebâtirreconstruirereleverréparer... 
Parole, ils sont toqués de l’incendie de Notre-Dame ! Un chenapan inventif, sans vergogne, capable de déjouer le gendarme, en vendrait des fragments, comme le mur de Berlin débité à la découpe, il ferait fortune.
Elle soupire et reprend son tricot, un point à l’envers, deux points à l’endroit, et on recommence, pas besoin de réfléchir. Un pas à Anvers, deux pas à Détroit, l’automatisme des doigts travaille pour elle. Elle laisse errer sa pensée... Pourquoi pas le Viet-Nam ? Notre-Dame de Saïgon. Gagner gros... c’est pas pour toi ma cocotte ! Gagner gros et … Et quoi ?
Elle qui n’a jamais jubilé, quel poulet pourrait la faire saliver ? Quel poulet, quel follet ?
(Annie Hupé)


Y a comme un os
Il fallait se rendre à l’évidence : son cubitus droit n’était plus ce qu’il avait été. Elle avait beau le cacher sous une pelure tricotée maison, rien n’y faisait alors, ce soir-là, elle ajouta, dans le ragoût, une bonne rasade de térébenthine et une décoction de punaises qui ne demandait qu’à s’adosser à la louche. 
Il avait faim. Elle avait entendu ses papilles tintinuller dès qu’il avait posé ses gros pieds sur le paillasson du bercail. Il ne sentait pas le muguet, c’est vraimais il savait tout rebâtir, tout reconstruire, tout réparer, alors elle avait accepté et son odeur et son teint marmoréen et son unique rouflaquette. Mais ce soir… ce serait non seulement leur jubilé conjugal mais aussi le big bang. Elle posa la cocotte en fonte sur la table et elle dit :
— Vas-y franchement, y a que du bon, surtout pour ta constipation.
Et lui, légèrement gêné par une vergogne passagère, il lapa la daube sans cesser de saliver. Ses pensées commençaient à errer. Son visage devint solaire ce qui n’arrivait jamais même dans la pleine chaleur de l’été. Il se mit à fredonner un air de salsa qu’il avait appris au Viet-Nam. Elle commençait à trouver le temps long. Elle se mit à arpenter la cuisine lorsqu’il lui reparla de son cubitus :
— Il est plus tordu que les autres jours, t’aurais pas une fracture ?
C’est à ce moment-là qu’elle saisit une cordelette enduite de bagasse et qu’elle tentât de relever son menton sans dilettante. Il crut avoir la berlue quand il sentit la vergeure sangler sa gorge. Il se débattait pour tenter de sauvegarder le bout de barbaque coincé dans son gosier mais sa vigilance perdait de l’altitude, bercée par les chants lointains d’une Hyperborée suceuse de vie. Il chut avant de s’ouvrir le crâne sur un manche de pioche laissé là sans hasard. Encore vaillant, il lança un : 
— Faloppe !
Il n’avait jamais souffert de zozotements mais sa langue lui imposait maintenant un langage fleuri qui finit par se taire définitivement. Elle trouva refuge dans le cliquetis inventif de son ouvrage qu’elle maniait en murmurant sa rengaine préférée : un point à l’endroitun point à l’envers, puis elle frotta son visage bien pimpeloché :
— Sapristi ! J’ai faim ! 
Elle se jeta sur la grosse casserole et finit le mironton. Gourmande à la mémoire chétive, elle mange aujourd’hui le pissenlit par la racine.
L’escadron de gendarmes, ils étaient soixante-huit, dépêché sur place, a extirpé l’unique fragment patrimonial du couple : une intaille dorée sertie sur le cubitus droit de la colérique tricoteuse.
(Sylvie Franceus)


Fierté
Gabriel Faloppe, vers 1550, polissait l’intaille  marmoréenne qu’il réparait. Malgré sa constipation chronique, survenue après sa fracture du cubitus, il avait pu sauvegarder sa dextérité, sans avoir la berlue, et rebâtir avec chaleur son refuge d’anatomie, avec une pioche solide. Il venait de relever les vergeures de la térébenthine, pour reconstruire un fragment solaire d’un crâne improbable venu d’Hyperborée ou du big-bang
Il s’adossa  en dilettante à un autre  travail complexe. Il s’ouvrit une brassée de bagasses pour tisser les fibres un point à l’endroit, un point à  l’envers. Il ne lui fallait pas moins de 68 cordelettes pour le paillasson qu’il avait promis à sa cocotte pimpelochée qui, ce soir, reviendrait sans vergogne au bercail d’une salsa effrénée. Sapristi ! ce n’est ni au Viet-nam, ni à Tahiti, qu’il aurait arpenté le parquet de jeunes filles aux rouflaquettes fleuries de pelures colorées, de pissenlits ou de muguet  ! Ces femmes inventives qui tintinullaient de leurs bracelets, envoûtantes erraient sous l’œil de ces punaises de gendarmes, qui salivaient appelés pour une altercation. Gabriel Faloppe sortit de cette image, pour terminer l’intaille. Elle serait présentée dans une semaine au jubilé du maître de Venise.
(Sophie Marie Van der Pas)  

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