Christine Larroque




Un glissement sur la ville...





Le refoulé est dans et hors la ville.


L’indésirable est expulsé à la périphérie du vivant. A tout prix, cette chair nauséabonde de la ville est à éradiquer. C’est impérieux, pressant, la menace piétine…


Le cri est muselé, dressé à l’immobilité, pourchassé à l’extrême lisière d’une multitude qui se frôle.


La ville refoule ce qui la constitue, elle déchire les lambeaux qu’elle ne reconnaît pas, elle ne veut pas de morceaux étranges. L’étrangeté l’étouffe, elle se sent menacée et craint, on ne sait quel péril.


Pas de poussière pour accueillir le désespoir. Les trottoirs brillent comme des décors de théâtre.


Au surgissement du matin, les pas y glissent sur une délicate vapeur à l’effluve quasi chirurgicale qui laissera chaque jour, recommencé, la place au rien.


Pas de traces, pas de débris, pas d’infime manifestation de mouvements d’humains. A l’aube, dans l’inconscience du sommeil, toute marque insoupçonnable sans relâche traquée.


Seul, peut-être, l’insignifiant martèlement d'un pas sur le pavé à l’infini identique pour tenter de faire revenir la vie.











Christine Larroque, 55 ans, vit à Toulouse. Après avoir été travailleur social, elle est enseignante. Ses activités militantes la conduisent à participer à des performances avec des artistes pour que l'art fasse effraction dans l'espace public et y fasse entendre des voix trop souvent inaudibles. Présente dans les n° 42, 43 et 44 de Lichen.



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